La combinaison de l’architecture et de l‘ingénierie au sein même d’une agence est une pratique encore timide en France contrairement aux pays du nord de l’Europe, même s’il existe des pionniers comme AIA Life Designers. L’agence allemande Rundzwei en offre ici un exemple avec cette maison familiale enveloppée de liège.
Rundzwei est une agence d’architecture berlinoise fondée par Andreas Reeg et Marc Dufour-Feronce, tous les deux architectes et ingénieurs. Avant de fonder leur agence, Andreas Reeg était chef de projet pour Herzog et De Meurontandis Marc Dufour-Feronce était chef de projet dans le cabinet londonien ACME.
Contexte et implantation
L’agence Rundzwei a eu le plaisir de recevoir une cliente qui leur demanda une maison non conventionnelle. Une demande qui leur a permis d’explorer différents possibles, toutefois, le principal obstacle est venu du règlement urbanistique local. Il était impossible de construire une maison excédant un étage qui aurait entrainé une surface d’environ 100 m2 ce qui ne répondait pas aux besoins de la cliente.
La surface finalement construite est de 248 m2 au cœur d’un lotissement à la frange Est de la ville de Berlin. Ce lotissement a vu la plupart de ses parcelles divisées en deux avec la construction d’une seconde maison en fond de parcelle. C’est également le cas pour cette maison qui n’est donc pas directement vue depuis la rue.
Composition architecturale de la maison
Comme beaucoup de contraintes, la réglementation d’urbanisme donna toute la singularité architecturale du projet. Interrogé par Kiiwan, l’architecte Andreas Reeg explique : « En raison de règles d’urbanisme strictes, nous avons dû proposer des astuces de définition de la planification pour obtenir le m² utilisable souhaité par le client. Le résultat est les sols en gradins ». En effet, comme vous pouvez le voir sur la coupe déroulée ci-dessous, il n’y a pas de réel rez-de-chaussée ni d’étage mais un enchainement de palier qui se déroule jusqu’au bureau dans les combles.
Ainsi, les différentes pièces de la maison viennent entourer une cage d’escalier sous une verrière. Le puit central permet de diffuser la lumière zénithale jusqu’à la pièce de vie dans l’entre-sol.
La suite parentale s’ancre dans le sol où un bandeau vitré vient l’éclairer. Ce choix s’explique par un désir de la cliente de pouvoir nager sans être vu. La piscine qui s’étend sur 7,5 mètres de long pour 2,26 mètres de large s’inscrit dans la continuité de la chambre parentale. Celle-ci se prolonge avec une salle de bain et vient s’achever par un retour abritant le dressing. En complément, un sauna vient s’installer sous l’espace de vie.
Le socle enterré est délimité par un mur en béton pisé que l’on retrouve également autour de la piscine. Il vient ainsi porter les grandes baies qui forme l’enveloppe du séjour offrant une connexion visuelle directe avec l’extérieur tout en jouant avec les niveaux pour donner plus d’intimité à la salle à manger et au salon.
L’escalier fait écho à la structure de la maison qui est en ossature bois. L’absence de rambarde horizontale pour les garde-corps au profit de petits potelets blanc que l’on retrouve également à l’extérieur renforce la singularité architecturale de la maison.
Une façade en liège
Le liège est un excellent isolant acoustique, c’est pour cela qu’on le retrouve dans les planchers. Toutefois, ce matériau a d’autres atouts qui lui permettent d’être utilisé en façade, il est notamment résistant à la moisissure. Le liège n’a reçu aucun traitement particulier ce qui fait de lui un choix respectueux de l’environnement.
Les panneaux de liège ont été découpés sur mesure par l’entreprise de menuiserie qui a été en charge de toute la charpente bois et de l’enveloppe. L’architecte Andreas Reeg nous raconte : « Nous avons également exploré, rendu, les façades en bois, verre et aluminium. Grâce à un employé portugais, nous avons également découvert le liège comme matériau de façade. L'utilisation du liège comme revêtement de façade est fréquemment utilisée au Portugal. Lorsque nous avons présenté les options ci-dessus et le liège, le client a été immédiatement convaincu par le liège. Le résultat ici se veut de faire quelque chose d'exceptionnel ».
Le liège utilisé est issu des déchets de la production des bouchons des bouteilles de vins, ces derniers sont ensuite comprimés et soumis à haute température pour libérer la résine du liège. L’architecte détaille « Quelques bâtiments avec ce type de produit ont été revêtus il y a 20 ans sans aucun entretien jusqu'à présent. Il y a aussi d'autres bâtiments vêtus de liège qui ont environ 100 ans, bien qu'ils soient vêtus d'une manière totalement différente. La durée de vie est très longue car le liège ne se décompose pas et est naturellement résistant aux intempéries et aux UV. Mais de l'autre côté, il n'y a pas beaucoup de bâtiments recouverts de liège pour donner une espérance de vie significative. Nous pensons, avec le fabricant Amorim, que 80 à 100 ans sont facilement possibles ».
Choix techniques et environnementaux de Rundzwei
Du point de vue environnemental, les architectes ont isolé la maison avec de la ouate de cellulose et des fibres de bois. Le choix des revêtements intérieurs s’est effectué en faveur de matériaux absorbants l’humidité pour éviter de mettre en place une ventilation complexe. Les eaux de pluies sont récupérées à chaque angle de la toiture puis conduites à une cuve qui permet d’arroser le jardin. Les décentes d’eaux pluviales ont été passées à l’intérieur de l’ossature afin de ne pas être vues.
Le réseau de chauffage utilisé est un nouveau système allemand récemment primé, il se sert de la chaleur produite par la cheminée, de la masse thermique active, d’une chaufferie gaz et des panneaux solaires SolarWorld qui viennent compléter les apports énergétiques de la maison. Celle-ci est pratiquement autonome.
- Architecte : Rundzwei
- Maître d’ouvrage : Particulier
- Fabricant : Amorim (panneau de façade), Würth, SolarWorld (panneau solaire), Gutex (isolant Thermofibre), Warema, Somfy, Schüco, Fermacell
- 2016 : Début des études
- 2018 : Date de livraison